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Les villes à travers les documents anciens

Le commerce à Lyon au 18ème siècle

 

Outre cette page sur le commerce de Lyon au 18ème siècle, voir aussi :

Ouvriers de la soie à Lyon - gravure de 1855 reproduite  puis restaurée par © Norbert Pousseur
Ouvriers de la soie à Lyon vers 1850,
gravure extraite de la France illustrée de Malte-Brun - éd. 1855


Le Dictionnaire universel du Commerce, de Jacques Savary des Bruslons, consacre deux longues pages à Lyon à travers ses activités manufacturières et commerciales au 18ème siècle. Il m'a semblé que ce texte complétait assez bien les autres pages sur le Lyon ancien, publié sur ce site.

 

Article 'Lyon', extrait du "Dictionnaire universel du Commerce", de Jacques Savary des Bruslons, édition 1748

 

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L’on doit également le grand Commerce de la Ville de Lyon, et à son heureuse situation, et au génie de ses habitants pour les Manufactures et le négoce, où ils se sont toujours distingués.
A l’égard de la situation, quatre grandes rivières, ou qui l’arrosent, ou qui n’en sont pas éloignées, lui fournissent de grandes commodités, et des voitures aisées, pour porter ses marchandises, soit dans l’intérieur du Royaume, soit dans les pays étrangers ; ou pour transporter chez elle les retours quelle fait, et les marchandises quelle tire du dedans ou du dehors.
Ces rivières sont, le Rhône, la Saône, la Loire, et le Doux.
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Lyon depuis la Saône- gravure de 1827 reproduite  puis restaurée par © Norbert Pousseur
Lyon depuis la Saône, avec diverses embarcations (pêche et transport de marchandises)
Gravure extraite du 'Nouveau voyage pittoresque en France' chez Ostevald -1827


Par le Rhône, elle a communication avec le Dauphiné, la Provence, le Languedoc, et même avec la Guyenne, par le canal du Languedoc : et c’est par là encore, que communiquant avec la Méditerranée, elle entretient son Commerce avec l’Italie, l’Espagne, et tout le Levant.
La rivière de Saône, dans laquelle tombe le Doux, lui ouvre la Bourgogne et la Franche-Comté, dont on gagne aisément par terre, et par un trajet assez court, l’Alsace, la Lorraine, et la Champagne.
Enfin, la Loire, qui commence à être navigable  à Roanne, à douze lieues de Lyon, lui facilite le commerce avec Paris, et toutes les Provinces du cœur du Royaume ; et même lui peut donner part à celui que la France fait par l’Océan avec les Nations des quatre Parties de la Terre.
D’ailleurs, la Ville de Lyon étant dans le voisinage de la Suisse et de la Savoie, il lui est aisé de porter par là son négoce dans une partie de l'Allemagne, dans le Piémont, et dans le Milanais.

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Le plus grand négoce de Lyon consiste en la fabrique des draps d’or et d’argent, et de toute sorte d’étoffes de soie, comme velours, damas, satins, moires, taffetas, etc. où, année commune, il n’entre guère moins que pour onze millions de matières d’or, d’argent, et de soie.

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Le Commerce de Lyon doit être considéré en deux manières ; l’une par rapport aux Pays avec lesquels cette Ville négocie ; et l’autre par rapport aux différentes marchandises qui entrent dans son négoce. L’une et l’autre sont expliquées dans la suite.
Les Nations étrangères, avec qui les Marchands de Lyon font le plus de Commerce, sont ; l’Espagne, l’Italie, les Suisses, l’Allemagne, la Hollande, l’Angleterre, les Génois, et les Marchands de Marseille, pour le Levant ; enfin la Pologne.

Espagne : Peu de Marchands de Lyon négocient directement en Espagne : le Commerce qu’ils y ont, se fait pour la plus grande  partie par l'entremise des Italiens, surtout des Génois. ; et par cette voie le Commerce des Lyonnais s’étend jusqu’aux Indes Espagnoles.
La dorure, les draperies des moindres qualités, les toiles, les futaines, le safran, et le papier, sont les marchandises que Lyon envoie en Espagne. Celles qu’on en tire, sont des laines, des soies, des drogues pour la teinture, des piastres, et des lingots d’or et d’argent.
On estime qu’il vient à Lyon cinq millions en or et en argent ; mais il n’y en a guère que la moitié, qui soit directement le retour des marchandises envoyées de Lyon en Espagne ; l’autre moitié y étant attirée de toutes parts, par le débit qui s’y en trouve sûrement à la faveur de l’affinage.

Italie : Les marchandises que la Ville de Lyon envoie en Italie, et qui la plupart se fabriquent chez elle, montent, année commune, à six à sept millions ; et celles qu’elle en tire, au moins à dix millions. Cette balance paraît d’abord désavantageuse aux Lyonnais ; l’avantage du Commerce restant ordinairement du côté de celui qui reçoit plus de retour en argent : mais cette maxime ne peut avoir lieu en cette occasion ; les fabriques de Lyon ayant absolument  besoin des soies d’Italie, et de l’argent d’Espagne, qui lui viennent par les Italiens à assez bon compte ; et qui étant mis en œuvre par ses Manufacturiers, lui produisent un profit, qui la dédommage bien de l’inégalité qu’il y a dans le nombre des marchandises qu’elle reçoit d’Italie, ou quelle y envoie.

Suisse : Le Commerce de Lyon avec les Suisses, se fait principalement avec les Villes de Zurich et de Saint-Gal : il s’étend néanmoins jusqu’à Berne, à Bade, à Schaffhouse, et aux foires de Zurzach.
Toutes ces Villes fournissent à Lyon, des soies et fleurettes fabriquées à Zurich, des toiles, des fromages, et des chevaux : elles en tirent en échange beaucoup de draperies grossières, des chapeaux, du safran, des vins, des huiles, du savon, et de la mercerie. On prétend que tout ce que Lyon fournit à la Suisse, ne va pas à un million de livres par an ; et qu’au contraire, on en tire, année commune, pour plus de quinze cent mille livres, en toiles et en fromages ; et pendant la guerre, encore un million en chevaux ; en sorte que ce Commerce paraîtrait plus onéreux qu’utile au Royaume : mais on sait que ces anciens Alliés de la France sont considérés par des endroits plus importants, que celui du négoce.

Allemagne : Dans le Commerce que les Lyonnais entretiennent avec plusieurs des plus grandes Villes d’Allemagne, ils y envoient les mêmes marchandises qu’en Suisse ; et encore des étoffes de soie or et  argent, et beaucoup de dorures : on y fait même passer tout ce qu’il y a de plus beau dans cette espèce ; les Allemands se piquant de goût et de magnificence pour la parure.
Ce Commerce est très avantageux à Lyon ; les envois des Lyonnais montant à plus de quinze cents mille livres ; et les retours ne montant pas au quart de cette somme, en étain, en cuivre, en fer blanc, et en quantité de mercerie.
On tirait autrefois de Nuremberg, beaucoup de faux trait (fil de métal, or, argent...) : mais les nouveaux droits d’entrée, qu’on a mis sur cette marchandise, en a fait tomber le négoce, par rapport à la France.
Il faut remarquer, que les Français vendent à crédit, et les Allemands toujours au comptant.

Hollande : Le plus grand Commerce que la Ville de Lyon fasse avec les Hollandais, consiste en remises d’argent, et en négociations de Lettres de change. Sa principale correspondance à cet égard est avec Amsterdam et Rotterdam. Elle ne laisse pas de tirer des draps de Leyde, et des toiles de Harlem.
Les marchandises que l’on envoie de Lyon en Hollande, ne montent pas à cinq cents mille livres, en taffetas noirs, et en étoffes de soie, d'or, et d’argent ; encore ces envois sont-ils bien diminués, depuis qu’ils ont imité nos Manufactures. On y envoie  aussi quelques fruits de Provence, et des graines de jardin de Languedoc.
On tient qu’il se tire de Hollande pour Lyon, deux fois plus de marchandises qu’il ne s’y en envoie.

Angleterre : Lyon fait aussi un assez grand Commerce avec l’Angleterre, particulièrement avec les Villes de Londres, d’Exeter, et de Plymouth ; avec Londres, pour ses draps ; avec Exeter, pour ses serges ; et avec Plymouth, pour de l’étain et du plomb. On en tire aussi des bas, quelque mercerie, du poivre, des drogues pour la teinture, comme noix de galle et bois de campêche, et quelquefois des soies ; mais ce n’est que quand toutes ces choses manquent à Marseille.
Les envois de Lyon pour l’Angleterre, sont des taffetas lustrés, la plupart noirs ; des étoffes de soie, et des brocards d’or et d’argent. Le commerce des taffetas y est si bon, que souvent en une seule foire de Lyon, il en sort pour plus de deux cents mille écus.
Les marchandises de Lyon pour l’Angleterre, vont à trois millions de livres par an ; et celles d’Angleterre pour Lyon, seulement à sept à huit cents mille livres ; en sorte que la balance de ce Commerce est d’un quart contre trois quarts, que les Anglais payent en argent, ou en lettres de change.

Le Levant : A l’égard du Commerce de Levant, que les Lyonnais font par la voie de Marseille ou de Gènes, on tient qu’ils y sont intéressés pour environ quinze cents mille livres par année.

Pologne : Pour celui de Pologne, c’est peu de chose. Il y a cependant une société de Marchands de dorure à Lyon, qui a un magasin à Varsovie : mais les étoffes qu’on y envoie, ne sont que de médiocre qualité.

France : Le Commerce que la Ville de Lyon fait dans l’intérieur du Royaume, n’est pas moins considérable que celui qu’elle entretient au dehors avec les Étrangers : mais sans entrer dans le détail, il suffira de remarquer, que cette Ville se trouvant par sa situation presque au milieu de la France, et dans la route la plus aisée, elle sert, pour ainsi dire, à réunir le négoce des diverses Provinces, qui viennent y aboutir ; et qu’ainsi non seulement elle envoie de part et d’autre les marchandises qui sont comme de son cru, et qui se fabriquent dans ses Manufactures ; mais encore qu’elle enrichit son Commerce de toutes celles qu’elle rassemble, et quelle tire de quantité d’autres lieux ; en sorte qu’on y voit sans cesse passer les huiles et les fruits secs de Provence ; les draps, les vins, et les eaux-de-vie du Languedoc ; les  safrans de Guyenne ; les petites étoffes de Champagne ; les toiles de Picardie, du Maine, de Normandie, et de Bretagne ; les blés de Bourgogne ; et les chapeaux de presque toutes les Manufactures du Royaume.


Lyon en bord de Saöne - gravure de 1835 reproduite  puis restaurée par © Norbert Pousseur
Lyon vers 1830, avec ses pêcheurs et le transport de marchandises à dos de cheval.
Gravure extraite de la France pittoresque d'Abel Hugo - éd. 1835


L’on ne dit rien ici des quatre foires franches de Lyon, non plus que des payements en foires, qui rendent cette Ville si célèbre dans toute l’Europe, et qui y attirent tant de Marchands, qui, pour ainsi dire, y viennent en respecter la police et les usages. L’on n’entre pas non plus dans le Commerce des soies, dont Lyon est comme l’étape générale par rapport à la France. Enfin, on omet tout ce qui peut regarder l'établissement des basins en France, qui ont commencé par Lyon ; le grand Commerce qui s’en faisait ; et la chute de ce Commerce, par rapport aux Lyonnais ; toutes ces matières devant être traitées plus convenablement ailleurs dans ce dictionnaire.


Lyon, ouvriers en soie - gravure de 1855 reproduite  puis restaurée par © Norbert Pousseur
À Lyon vers 1850, atelier de soie de Lemyre frères,.
Gravure de Chapori extraite du 'Magasin pittoresque', année 1855

C’est par la même raison que l’on ne parlera pas pareillement, ni de l’affinage de l’or et de l’argent, qui se fait à Lyon par quatre Affineurs du Roi, qui y attire une si grande quantité de ces riches matières ; ni du Commerce de l’or filé, qui s’y fabrique mieux qu’en lieu de l’Europe, et dont il se fait de si grands envois, tant au dedans du Royaume, qu’au-dehors ; ni de la Communauté et du trafic des Tireurs et Écacheurs d’or, qui font ce Commerce.

Enfin, on se contentera d’ajouter à ce qu’on a dit jusqu’ici du Commerce de Lyon, qu’on estime qu’il y entre environ pour onze millions de matières, tant soie, qu’or et argent, qui s’emploient dans les Manufactures de cette Ville : Que la préparation de ces matières, et la façon des différents ouvrages qu’on en fabrique, montent à plus de trois millions : Que la vente qui s’en fait, tant par les Marchands de Lyon, que ceux des autres Villes du Royaume, qui les tirent d’eux, produit encore au-delà de trois millions : Et que des dix-sept millions, et plus, qui composent le total de ces trois sommes, les Étrangers en payent bien environ le tiers ; ce qui s’entend des temps de paix, et lorsque le Commerce fleurit dans le Royaume.


Ouvriers en soie de Lyon - gravure de 1855 reproduite  puis restaurée par © Norbert Pousseur
Ouvriers des soieries de Lyon
Gravure de Chapori extraite du 'Magasin pittoresque', année 1855

 

 

 

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