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Les villes à travers les documents anciens

 

Marseille décrite vers 1710 par un Claude Marin Saugrain

 

Port de Marseille vers 1710 - gravure  reproduite et restaurée par © Norbert Pousseur
Marseille et son port vers 1710 - Remarquez la chaîne à son embouchure

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Texte et gravure extraite de l'ouvrage "Nouveau voyage de France" de Claude Marin Saugrain,
dont la première édition date de 1720
(1771 pour cette version - collection personnelle)
.

 

MARSEILLE est une Ville de de France des plus considérables, et la plus peuplée et la plus marchande de la Provence, mais bien changée depuis qu’elle a été si cruellement affligée de la peste. Elle est si ancienne, qu'on la croit bâtie plus de 63o ans ayant sa Naissance de Jésus-Christ, Elle a été une République très florissante.

Son Académie lui acquit une si grande réputation, qu’il y venait des étudiants de toutes les parties du monde. Marseille est située au bas d’une colline  qui s’élève en amphithéâtre en s’éloignant de la Mer. Son Port, de forme ovale, et qui est des plus fréquentés pour le Commerce, est revêtu d’un quai de treize à quatorze cents pas de longueur, où sont les plus belles maisons de la Ville. Il fournit une promenade fort satisfaisante, dont une partie est occupée pendant le jour par des échoppes ou boutiques d’ouvriers galériens, construites à peu près comme étaient celles du Pont-Neuf à Paris. On trouve dans ces boutiques mille nippes, et autres commodités nécessaires ; mais ceux qui vont les acheter doivent être en garde sur l’adresse de tels marchands. L’embouchure du Port est fermée d’une chaîne soutenue à certaine distance sur trois différentes piles bâties de pierres, qui ne laissent que le passage d’un gros Vaisseau. Ce Port peut en contenir jusqu’à 600 ; et l’on y en voit aborder de toutes les parties du monde, qui apportent toutes sortes de marchandises. On estime les Marseillais  bons mariniers, très experts, principalement sur la Mer Méditerranée.

L’église Cathédrale, appelée Notre-Dame la Majour, et qui reconnaît  S. Lazare  pour Patron, est très sombre ; c'était autrefois un temple dédié à Vénus, ou à Diane d’éphèse. Sa forme en paraît extraordinaire, et l'on n’y a rien voulu ajouter, ni diminuer. Il y a quelques grosses colonnes sur lesquelles l’Idole était posée. Le trésor de cette église passe pour très riche. On y voit le chef (la tête) de S. Lazare, celui de S. Cannat, un pied de S. Victor, et beaucoup d’autres Reliques. Proche de la Cathédrale, dans un petit carrefour, il y a une Chapelle bâtie à la place où les Marseillais disent que la Madeleine se mettait pour prêcher l’évangile aux peuples Idolâtres, lorsqu’ils sortaient de leur Temple.

Notre-Dame des Acoules est une belle et grande église qui était un temple dédié à la Déesse Pallas. Dans celle de S. Martin, Collégiale et Paroissiale, on conserve une Image de la Sainte Vierge en argent, de cinq pieds et demi de hauteur, dont la couronne et les ornements sont d’une richesse immense. L’église S. Sauveur, présentement occupée j par des Religieuses, était consacrée à Apollon. Tous ces lieux sont autant de preuves de l’antiquité de Marseille ; de même que deux autres temples qui fermaient autrefois son Port, avec les deux Tours, dont l’une est appelée S. Jean, Commanderie de Chevaliers de Malte, et l'autre S. Nicolas.
L’Abbaye de S. Victor, Ordre de S. Benoît, est située au pied de la Citadelle. Elle ressemble à un Château, étant fermée de murailles munies de tours, sur le haut desquelles on peut se promener. Au frontispice de l’église sont ces paroles adressées à S. Victor : Massilliam verè, Victor, civesquetuere. Dans une chapelle, du côté de l’épître, on voit le Chef  de ce Saint  dans une Chasse d’argent doré bien travaillée et donnée par le Pape Urbain V, dont le tombeau est à côté du Chœur. Il y a quantité d’autres Reliques dans cette église. On descend par un grand escalier dans l’église souterraine, dont les chapelles que vont voir les Curieux, sont remplies de Corps saints. On leur fait voir le tombeau de Saint Eusèbe, et ceux de quarante-cinq filles qui se défigurèrent pour faire horreur aux Vandales qui leur ôtèrent la vie. On y voit aussi la Croix de Saint André, qui est en son entier : les branches ont sept pieds de long, et le bois a huit pouces de largeur. On remarque dans une de ces chapelles souterraines une petite grotte où la Madeleine, dit-on, après avoir débarqué à Marseille commença à faire pénitence ; on dit aussi qu’elle y a habitée six ou sept ans : elle est représentée couchée à l’entrée de cette grotte, Il y a aussi une riche chapelle de Notre-Dame où il n’est pas permis aux femmes d’entrer ; cette défense leur a été faite, selon l’opinion du peuple, qui dit qu’une Reine y étant entrée avec trop d’hardiesse, en sortit aveugle.

On peut voir dans Marseille les Maisons Religieuses, et les églises des Chartreux, des Religieux de Saint Antoine, des Trinitaires, des Jacobins, des Augustins et des Augustins Déchaussés des Carmes et des Carmes Déchaussées, des Cordeliers Observantins, des Servites, des Minimes, des Capucins, des Récollets, de la Mercy, des Feuillants, des Pères de l’Oratoire, des Pères de la Mission. Il y a aussi des Bénédictines, des Dominicaines, des Filles de Sainte Claire, des Capucines, des Carmélites, des Bernardines, des Ursulines, des Filles de la Visitation, de la Miséricorde, et du Bon-Pasteur ou Repenties, et une Commanderie de Malte.

La Citadelle de Marseille est proche du Port : elle commande à la Ville, et ses fortifications s’étendent jusqu’à l’embouchure du Port. Le Quai qui borde de ce côté du Port, depuis le Fort S. Nicolas jusqu’à l’Arsenal, a quinze cents pas de long ; il y a des magasins et de belles maisons qui l’entourent. On y voit le grand Hôpital des Forçats malades ; ç’était l’ancien Arsenal avant que le nouveau fut commencé. Six grandi Pavillons et autant de corps de logis, accompagnés d’une grande place ou l’on peut bâtir plusieurs Galères, en forment le dessin. On y remarque deux grands bassins aussi longs et aussi profonds qu’une Galère, dans chacun desquels ( après qu’on en a construit une ) on ouvre une petite écluse qui retient de l’eau de la Mer : cette eau le remplit aussitôt, et fait flotter la Galère qui est sur le chantier et qui n’est point sujette par ce moyen à la seconde secousse qu’on lui donnerait, si on la poussait de dessus le chantier dans la Mer.
Ce grand édifice tient toute une face du Port, longue de trois cents pas : en sorte que la mesure du circuit du Port de Marseille, qui est de 1300 pas prise au Quai du côté la Ville, de 1500 pas à l’autre bord, de trois cents au fond du Port, et de cinquante à la largeur de l’embouchure, est en tout de 3150 pas communs. à cet Arsenal finissent les murailles de la Ville, qui n’enferment pas tout à  fait le Port, Les principales rues y viennent aboutir pour la commodité des Habitants : celles de l’ancienne Ville sont longues, mais étroites, et celles de la moderne sont spacieuses et bien bâties, La principale est le Cours, large de près de 40 pas, dont le milieu est une arène plantée de quatre rangs d’Ormeaux, qui forment une allée dans le goût de la grande allée du Jardin des Tuileries, qui sert, avec le Port, de promenade publique.

On doit voir à Marseille ce qu’on appelle la Loge, autrement l’Hôtel de Ville, qui est située sur le Port, vis-à-vis les Galères ; le bas est une grande salle qui sert de rendez-vous aux Négociants ou Marins ; et le haut contient un appartement pour les assemblées des Consuls et Conseillers de Ville, et autres concernant le Gouvernement civil, et la Justice de la Bourse. Ce qu’on estime de plus beau de cet édifice, ce sont les armes de la Ville qui se voient au frontispice, sculptées par le fameux Puget.
Il semble que Marseille   tienne encore quelque chose de l’ancien Gouvernement de ses quatre Comtes, puisqu’on la divise en quatre quartiers, qui sont ceux de Saint Jean, de Cavaillon, du Corps de Ville, et de la Blancardie ; ils ont chacun leurs Capitaines, et autres Officiers. La Porte Royale est fort belle, ayant à ses deux côtés les figures de S. Lazare, Evêque, et de S. Victor, Martyr, tous deux Patrons de la Ville ; au milieu en haut de celle de Louis IV. est à demi corps, et au-dessus cette inscription : Sub cujus imperio summa libertas.

L’enceinte de Marseille est fortifiée par de belles murailles, et le Tétragone qui domine sur une partie de la Ville, qui est la principale des deux Citadelles qui la défendent, est commandé à la portée du canon, par un Fort appelé communément Notre-Dame de. la Garde, où les Habitants vont souvent en dévotion, et d’où l'on découvre les Vaisseaux qui sont en Mer aussi loin que la vue le permet. Ce Fort est bâti au sommet d’une Montagne, sur les ruines d’un ancien Temple de Vénus appelé Ephesium.

L’arrivée à Marseille par Mer est très  agréable. La Ville parait comme une grande terrasse qui s’élève au bord de la Mer, devant laquelle on voit des îles d’If, de Ratonneau, et de Pomégues, dont elles ne sont éloignées que d’une lieue. Il y a un Fort Château dans chacune de ces îles, ou les Vaisseaux vont ordinairement attendre le vent propre pour partir : là on doit visiter le Lazaret, bâti dans une de ces îles, à un quart de lieue de la plage. De cet endroit, comme à Notre-Dame de la Garde, on découvre la Mer avec autant d’étendue que l’œil ou la rondeur du globe le peuvent permettre.

Marseille est environné d’une grande campagne de deux lieues, où sont près de six mille Bastides, maisons de plaisir des bourgeois ; elles sont simplement composées d’un petit pavillon, avec un jardin rempli vignes, de figuiers, d’orangers, et les habitants de Marseille tirent l'eau qui leur est nécessaire d’une source qui se divise en plusieurs fontaines dans la Ville dont l'une vient jusque sur le Port.

Il y a de Marseille au Pin une poste, et du Pin à Aix une poste et demie.

 

 

 

 

 

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